Sainté et le Tour, un centenaire en forme

Le centenaire du Tour en l'an 2003 restera comme l'une des dates majeures de l'histoire du sport cycliste et de l'Histoire tout simplement. Le Tour, élément du patrimoine populaire passionne les foules depuis maintenant un siècle. Chaque été, nous sommes des millions à entrer dans le Tour.

Quel pays mieux que celui des plaines, des mers et des cols aurait pu constituer un décor plus approprié pour une épreuve cycliste ! Le Tourmalet, l'Aubisque escaladés pour la première fois en 1910, le Galibier l'année suivante, l'Izoard en 1922 et plus récemment les quatorze lacets de l'Alpe d'Huez ou le Ventoux renvoient aux exploits les plus insensés, aux défaillances les plus cruelles, aux drames les plus épouvantables. Pour franchir l'infranchissable, les coureurs magnifiés par la plume des journalistes sportifs se font " routiers hercule ", forçats de la route, " aigles de la montagne ".... Ils deviennent les héros d'un espace géographique mythique qu'ils ont construit et popularisé à la force du mollet.

Et il y a aussi cette plongée en la France des terroirs qui composent une mosaïque de pays avec une géographie, une histoire et des traditions qui leur sont propres. Car le Tour est ainsi, il joue subtilement à la fois sur l'identité locale et sur l'identité nationale, ce qui ne l'a pas empêché d'abandonner ses frontières pour s'ouvrir vers l'extérieur. Ainsi, en 1958, il part de Bruxelles et participe à sa manière à la construction de l'Europe communautaire et au rapprochement des peuples.

Dans les années 1980, le Tour est entré dans la mondialisation avec la participation de coureurs des pays le l'Est, australiens, canadiens, américains, colombiens ou encore brésiliens. Il joue de sa notoriété mondiale tout en renvoyant à l'enracinement au terroir. Il était donc normal que le Forez avec sa préfecture riche de son patrimoine industriel et capitale du cycle (les bicyclettes La Gauloise, l'Hirondelle, Le Chemineau Robust, Hunter, et plus près de nous Manufrance, Mercier pour n'en citer que quelques unes sont sortis des ateliers des manufactures et marchands de cycles ligériens) séduisent le Tour.

Une jeunesse rude 

Un Tour qui ignore Saint-Etienne comme ville étape durant près de cinquante ans même si la tragi-comédie qui se joua dans le col du Grand-Bois (plus connu aujourd'hui sous le nom de La République) lors de l'étape Lyon Marseille le 10 juillet 1904 marqua durablement les esprits. Dans l'obscurité, Maurice Garin, premier vainqueur de l'épreuve en 1903, dit "le petit ramoneur italien" est victime d'une embuscade tendue par quelques supporters du local Alfred Faure. Il ne doit son salut qu'à l'arrivée des officiels qui tirent quelques coups de revolver pour disperser les assaillants.

Ce Tour tourne dans le sens des aiguilles d'une montre (il en sera ainsi pour les 10 premières éditions), il est long de 2410 kilomètres pour seulement six étapes (Paris Lyon, Lyon Marseille, Marseille Toulouse, Toulouse Bordeaux, Bordeaux Nantes, Nantes Paris).On court la nuit (jusqu'en 1905). Les machines ne sont pas équipées de dérailleurs, le changement de vitesse se fait par retournement de la roue arrière .Les coureurs accomplissent des efforts surhumains pour le franchissement des premiers cols : l'Aubisque et le Tourmalet en 1910, le Galibier en 1911, Izoard et Vars en 1922. Plus que sept années avant l'apparition des premiers postes TSF qui donnent une dimension supplémentaire à l'héroïsme des coureurs. Les difficultés sont plus nombreuses, le kilométrage total a été augmenté mais les étapes longues de 400 kilomètres ont été abandonnées dès 1905 et la voiture balai créée en 1910. Et en 1937, les bicyclettes sont enfin munies de dérailleurs.

Dans le premier demi siècle d'existence, citons encore parmi les évènements marquants :

  • la création du maillot jaune en 1919.
  • l'introduction des équipes nationales qui remplacent les équipes de cycle qui assuraient la logistique et l'hébergement.
  • la création de la caravane publicitaire en 1930 pour financer et animer l'épreuve.
  • la création du grand prix de la montagne (mais il faut attendre 1975 pour le fameux maillot blanc à pois rouge du meilleur grimpeur).

Une longue histoire d'amour avec Saint-Etienne 

C'est déjà la plus grande épreuve cycliste du monde que les stéphanois en liesse accueillent pour la première fois le jeudi 3 août 1950, cours Fauriel, terme d'une étape Briançon Saint-Etienne longue de 291 kilomètres. C'est surtout une épreuve qui a su trouver la formule de course qui lui convient le mieux et qui ne connaîtra plus de grandes modifications dans son organisation, si ce n'est l'apparition du prologue en 1967 et la disparition des équipes nationales l'année suivante remplacées par des équipes sponsorisées.

Le début d'une belle histoire d'amour qui compte à ce jour 22 épisodes qui connurent pour la plupart leur dénouement sur la plus belle de nos avenues, cours Fauriel (sauf en 1953 et 1980).