Les étudiants stéphanois dans la grève
L'AGESE, à contre courant du mouvement national, refuse de suivre le mot d'ordre de grève générale lancé par l'UNEF le 6 mai en réaction aux brutalités policières parisiennes. Tout en condamnant ces dernières, sa présidente Michèle Pinos estime que la violence est aussi le fait de quelques groupuscules gauchistes irresponsables et que la grève discréditerait le mouvement étudiant en mettant en péril les examens. Le bureau de l'AGESE, dans lequel les communistes sont majoritaires, tente d'éviter la prise de contrôle de l'association par des "pseudo révolutionnaires" comme ce fut le cas dans d'autres universités. L'assemblée générale du 7 mai tourne à son désavantage, les étudiants votent la grève, d'abord pour deux jours (8 et 9 mai) puis générale après le 13 mai. La grève des 8 et 9 mai moyennement suivie avec néanmoins 70 % des effectifs du CLU et 80 % du CSU permet une prise de conscience des étudiants qui entament des débats sur le rôle et le fonctionnement de l'université.
Le Collège Littéraire Universitaire (CLU) est le principal foyer de la contestation. Il compte le plus grand nombre d'étudiants, ses représentants sont donc les plus nombreux au sein de l'Assemblée générale qui le 7 mai s'oppose à l'AGESE. Ils récidivent le 16 mai en votant le boycott des examens et en instaurant des commissions mixtes. Le 22 mai, ils décident d'occuper les locaux. Occupation qui dura jusqu'au 29 juin dans le calme et la bonne ambiance. Les autorités "déplorèrent" la pose d'un drapeau rouge et d'un drapeau noir sur la façade. Principale conséquence des évènements pour les étudiants : les pouvoirs publics et les élus, en particulier Michel Durafour, obtiennent à l'automne la création d'une université de plein exercice.
Les 290 élèves des classes préparatoires aux grandes écoles affichent encore une plus grande détermination que les lycéens et les étudiants du CLU. Leur action débute le 17 mai (5 jours avant l'appel à la grève générale) par une assemblée générale qui désigne les membres du Comité d'action et élabore une motion sur le réaménagement des études, la participation effective à la vie du lycée, l'autodiscipline et la solidarité universitaire. Ils tentent de coordonner leur action au niveau national en contactant les "prépas" de Strasbourg et de Paris donnant en plus une coloration révolutionnaire à leur mouvement par quelques critiques de la société. Mais les "prépas" profitent plus de la révolte qu'ils ne l'alimentent cherchant à faire aboutir des revendications spécifiques : obtenir un véritable statut étudiant avec les avantages qui lui sont attachés. A partir du 20 mai, près des trois quarts d'entre eux occupent le lycée Fauriel. La grève se poursuit au mois de juin, elle est prolongée le 12 juin par 80 % des effectifs présents.
Au regard des forces respectives (quelques centaines d'étudiants pour une population majoritairement composée d'ouvriers) le mouvement, à Saint-Etienne, change de nature à partir du 13 mai.