Le dix-neuvième siècle : l'essor

L'époque révolutionnaire - l'Empire

Saint-Étienne ne vit pas d'événements révolutionnaires d'une intensité particulière. Cependant, la Révolution française en créant les communes permet à la municipalité d'acquérir une certaine autonomie administrative. La ville appartient tout d'abord au département de Rhône-et-Loire, chef-lieu : Lyon. Lyon s'efforce d'entraîner Saint-Étienne dans la révolte contre la Convention durant le printemps et l'été 1793. Pour détacher le Forez de la révolte lyonnaise, la Convention enlève au département de Rhône et Loire les districts de Montbrison, Saint-Étienne et Roanne et crée le département de la Loire en novembre 1793.

En 1795, le chef-lieu du département est fixé à Montbrison.

Durant cette période, Saint-Étienne voit s'accélérer la croissance industrielle amorcée au XVIIIème siècle.

Les guerres incessantes sous la Révolution puis l'Empire développent prodigieusement l'armurerie de guerre.

L'essor de la ville (1815-1860)

En 1815, l'agglomération de Saint-Étienne est constituée par un ensemble de quatre communes : Saint-Étienne proprement dit ; Montaud au nord-ouest ; Outre-Furan au nord-est et enfin Valbenoite au sud-est. Ces trois dernières communes, bien moins peuplées, ont un vaste territoire ; une grande partie de leur superficie est encore en culture. Saint-Étienne au contraire, enserré dans les limites trop étroites, n'a plus de place pour accueillir de nouveaux habitants ou permettre la création de nouvelles usines.

Pour cette raison, Saint-Étienne demande l'annexion de ces communes suburbaines. L'administration au contraire crée de nouvelles communes : Beaubrun, détachée de Montaud en juillet 1842 et La Ricamarie, détachée de Valbenoite en 1843. Il faut attendre la loi du 31 mars 1855 pour que Saint-Étienne et les communes de Montaud, Beaubrun, Valbenoite et Outre-Furan fusionnent. Il devient alors logique que Saint-Étienne, ville la plus peuplée et la plus industrialisée, devienne administrativement le siège de la Préfecture.

Le décret impérial du 25 juillet 1855 établit le siège de la Préfecture du département de la Loire à Saint-Étienne à compter du 1er janvier 1856.

Entre 1815 et 1860, la ville n'a pas cessé de se développer, en liaison avec l'essor économique que connaît la région : essor de la production houillère, démarrage et apogée de la sidérurgie, prospérité de l'armurerie et de la rubanerie, facilitée par la naissance du chemin de fer.
La population s'accroît rapidement ainsi qu'en témoigne le tableau suivant, établi d'après les recensements officiels :

DATE

POPULATION

DATE

POPULATION

1856

1861

1866

1872

1876

1881

94.432

92.250

96.620

110.814

126.019

123.813

1886

1891

1896

1901

1906

1911

117.875

133.182

135.784

146.559

146.788

148.656



Cet accroissement de la population est essentiellement dû à une forte immigration de personnes originaires pour la plupart du Velay et du Vivarais.

L'augmentation de la population se traduit par une extension de la ville. Par la confiscation des biens du clergé, la Révolution créa les conditions du développement urbain.

L'architecte-voyer de la ville Dalgabio proposa le lotissement des terrains de l'ancien couvent Sainte-Catherine, permettant à Saint-Étienne de s'étendre sur un axe Nord-Sud, alors que les accroissements antérieurs suivaient une ligne Est-Ouest.

Il fonde ainsi les bases de l'urbanisme d'une ville industrielle moderne. La ville se dote d'un nouvel hôtel de ville construit entre 1822 et 1830, d'un Palais de Justice, d'une Bourse, d'une Condition des Soies, d'une Grand Rue, de nouvelles rues, de places... Ces nouvelles constructions s'accompagnent de travaux d'adduction d'eau, d'assainissement, d'éclairage...

Le Furan est progressivement couvert. Le cours Fauriel est tracé sur le cours du Chavanelet jusqu'au Rond-Point (1856-1865). D'autres bâtiments sont édifiés : une sous-préfecture (1853, devenue Palais des Arts), l'Ecole de dessin (1858), le Théâtre (1853)...

Crise et redressement (1860-1914)

Aux alentours de 1860, l'économie stéphanoise rencontre des difficultés qui vont durer jusqu'en 1890. Au début du siècle, Saint-Étienne avait un avantage certain : elle était à peu près la seule ville de France à avoir un réseau de voies ferrées modernes qui la reliait à l'extérieur (ouverture de la première ligne de chemin de fer en France : Saint-Étienne - Andrézieux-Bouthéon en mai 1827 ; l'ouverture officielle n'aura lieu qu'un an plus tard le 16 octobre 1828). En 1860, ce n'est plus vrai.

D'autre part, le bassin houiller montre ses limites et ne peut faire concurrence à la production du Nord et du Pas-de-Calais. Les difficultés des houillères s'aggravent du fait de nombreuses catastrophes.

La sidérurgie connaît aussi des difficultés en raison des problèmes d'approvisionnement en minerai et de la découverte d'un nouveau procédé qui permet d'utiliser l'abondant fer de Lorraine (procédé Gilchrist 1878). La manifestation la plus spectaculaire de la crise est la faillite en 1889 de la Compagnie des Forges et des Fonderies de Terrenoire.

La rubanerie traverse une grave crise autour des années 1870, due en grande partie à la mévente des articles chers et à la baisse du prix de la soie.

C'est seulement vers la fin du XIXème siècle que se manifeste un certain renouveau. Un effort d'adaptation a été fait.

On abandonne une grande partie des fabrications lourdes au profit de productions plus spécialisées de qualité comme les aciers spéciaux, les rubans façonnés et de velours, mais aussi de fabrications nouvelles comme le cycle et les pièces détachées d'automobile.

De nouvelles industries s'implantent avec des chefs d'entreprises dynamiques.

La Manufacture Française d'Armes (et Cycles, par la suite) est fondée en 1893 par Etienne Mimard et Pierre Blachon. C'est à cette époque que se crée la Société Guichard-Perrachon plus connue sous le nom de magasins du Casino.

L'essor démographique de la ville a suivi l'évolution économique ainsi qu'en témoigne le tableau suivant. On doit noter une stagnation et même une diminution de la population dans la seconde moitié du XIXème siècle suivies d'un renouveau vers 1900.


La ville a complété son équipement : Halles (1872), nouvelle gare à Châteaucreux (1886), lycée Fauriel (1890), Préfecture (1894-1900), nouvel hôpital à Bellevue (1895-1900), Bourse du Travail (1901-1903), Nouvelle Condition des Soies (1908)...

Les terrains délaissés de l'ancien hôpital permettent une grande opération d'urbanisme : la percée de l'avenue Président Faure (actuellement avenue de la Libération) en 1905-1907.